C’était cool de retrouver Steve Cropper, Booker T et Donald Dunn (1) au festival de Montreux ?
Oh ouais, on a même jammé et tout… Mais vous y étiez ?!!
Oui, c’était émouvant… Vous vous souvenez de votre première session studio avec Otis Redding ?
Ouais, je m’en rappelle : j’étais littéralement mort de trouille. Mais Otis a tout fait pour me mettre à l’aise. Il savait rendre les choses faciles, c’était un type très charismatique. Il avait beaucoup de talent pour tout ce qui touchait au travail de studio. En fait, notre job consistait à jammer avec lui. C’était tout. Avant de bosser avec lui, je m’étais souvent demandé pourquoi les autres musiciens étaient si excités avant chacune de ses sessions, genre «Oh Yes ! C’est Otis cet après-midi !» Je n’ai pas mis longtemps à comprendre. Enregistrer avec Otis, c’était du pur fun.
Vous avez enregistré quels titres ce jour-là ?
Ca fait tellement longtemps… Je ne me rappelle plus du premier titre qu’on ait fait mais je crois bien qu’on a enregistré « Fa-fa-fa-fa (Sad Song) » ce jour-là.
C’était votre première session professionnelle ?
Non. J’avais déjà eu quelques expériences avant ça, mais c’était ma première fois chez Stax. Ce label, c’était comme La Mecque pour nous. Ca m’a pris du temps avant d’y accéder. J’avais déjà été recalé à plusieurs reprises. Quand je me suis présenté avec les Do-Dads, ils ont bien voulu nous enregistrer mais il n’y a pas eu de suite… Ensuite je me suis pointé avec un groupe de Blues appelé Sir Valentine & His Swinging Cats : recalé. J’ai essayé avec les Teen Tones, mon groupe de Doo-Wop, avec les Morning stars, un groupe de Gospel, et aussi avec les Ambassadors, un autre groupe de Doo-Wop : à chaque fois sans succès…
En fait, je suis rentré chez Stax grâce à Floyd Newman, un saxophoniste baryton qui avait un petit groupe. Avec Howard Grimes (2), on lui avait écrit quelques arrangements, et je l’accompagnais au piano de temps en temps. Un jour, il nous amené enregistrer chez Stax, et c’est à cette occasion que Jim Stewart (3) s’est rendu compte que je me débrouillais pas mal au piano. Il m’a dit « Ecoute : Booker doit bientôt aller à la fac, il va devoir s’absenter régulièrement… Ca te dirait de prendre sa place, le temps qu’il revienne ? ». Sur le coup j’ai cru manquer d’air, mais j’ai réussi à feinter : « Mmmh, c’est une bonne idée… ». A l’intérieur, j’ai fait « YEEEEEAAAAAAH ! » (Rires)
Au lycée, vous aviez enregistré avec un groupe appelé les Asteroïds…
Hein ? (Il cherche) Oh merde, les Asteroïds ! Mais c’est tellement vieux ! J’ai traîné dans un paquet de groupes au lycée, j’ai du en oublier la moitié…
Et Johnny Taylor, c’est une rencontre importante ?
Lui, c’est le premier artiste de Blues pour lequel j’ai écris avec David Porter. On lui a écrit « I have a Dream » quand il est arrivé chez Stax.
Chez Stax, vous avez tout de suite fait équipe avec David Porter ?
Presque, oui. C’est lui qui est venu me proposer qu’on s’associe pour écrire. J’étais moyennement enthousiaste mais il avait l’air très déterminé, il disait qu’on devait joindre nos forces et faire équipe comme Holland-Dozier-Holland, les songwriters de Motown. On a commencé discrètement en refilant nos copies à Jim Stewart. Mais les mecs se sont vite rendus compte d’où ça venait, vu que partout où ils allaient, ils nous voyaient en train d’écrire sur un coin de table…
Quelle est la véritable histoire de « Hold On I’m Coming » de Sam & Dave ? David Porter aurait avoué s’inspirer du Motown Sound, notamment des Temptations de Norman Withfield.
Ca c’est ce que raconte David… Vous savez, David a connu un parcours différent du mien avant d’arriver chez Stax. Ce que vous avez lu est peut-être vrai en ce qui le concerne. Pour ma part, je reconnais qu’on écoutait beaucoup les disques de Motown, mais on n’a jamais cherché à appliquer quoi que se soit de leur technique. Ce qu’il fallait mettre au point, c’est la Southern formula (4)…
A cette époque, j’étais encore très jeune : peu de temps avant, j’écrivais quelques arrangements pour des petits groupes et j’étais complètement inexpérimenté en matière de studio. En arrivant chez Stax, j’ai franchi un palier très net. Ces mecs étaient une institution, ils avaient un vrai savoir-faire. Au début, j’ai passé mon temps à les observer, à regarder comment ils élaboraient leurs arrangements, et… ils n’écrivaient rien ! J’ai vraiment été surpris de voir que tous les arrangements se faisaient de tête. De mon côté j’ai pu m’adapter assez vite parce que j’avais déjà composé comme ça au lycée. J’ai commencé avec un groupe appelé les Missiles, dans lequel je jouais du sax… Donc je passais mon temps à observer comment Jim Stewart produisait et comment les autres gars composaient…Il y avait un orgue, un piano, Al Jackson à la batterie, Steve Cropper à la guitare et Donald Dunn à la basse… Quand Otis arrivait, il se mettait à écrire ses paroles devant toi, à partir de rien, et il fonçait au micro… Des fois, même, il allait directement au micro et se mettait à faire chanter ce qui lui passait par la tête. Il faisait signe à Jim d’enregistrer… Et ça faisait une chanson !
Les cuivres venaient toujours en dernier, alors tout le monde se regardait genre « Bon : et qu’est ce qu’on fait avec les cuivres ? T’as un truc toi ? » Et tout le monde s’observait en chien de faïence. C’est à ce moment que je proposais mes arrangements, parce que je n’étais jamais à court d’idées. C’est comme ça que j’ai commencé à arranger, en fait. C’est à force de proposer de bonnes mélodies, que j’ai consolidé ma place chez Stax. C’est allé très vite pour moi à partir de ce moment-là.
Au même moment, dans la même ville, il y avait Willie Mitchell (5) et son orchestre. On imagine une certaine compétition entre Hi Records et Stax…
Ouais, mais dans le bon sens du terme. Il n’y avait pas de coups tordus ni de rancœur. Tout le monde était pote à Memphis, on avait instauré une sorte de « créativité incestueuse ». J’ai fait des sessions chez Hi, ses musiciens ont fait enregistré chez Stax, et on a tous travaillé dans d’autres studios. Les musiciens des différents labels ne se considéraient pas comme appartenant à des entités rivales. On était juste content d’avoir du boulot à l’époque. Tout simplement.
D’ailleurs Al Jackson n’a jamais eu à choisir entre Stax et Hi : il a toujours fait les deux (6).
C’est juste. Personne n’est arrivé à nous monter les uns contre les autres…
On parlait d’Otis tout à l’heure… Quelle aurait été la suite de sa carrière sans cet accident d'avion (7)?
Otis serait allé très très haut. Il prenait de plus en plus d’importance, c’est sûr…
«Dock of the Bay» annonçait un changement radical dans son œuvre…
C’est juste !
Où allait-il d’après vous ?
Il a eu l’idée de ce titre après avoir joué au Festival Pop de Monterey. Ce concert a déclenché quelque chose en lui… D’ailleurs, ce titre a été un grand succès Pop. Otis était parti pour révolutionner le Rn’B et la musique en général. Malheureusement il y a eu ce crash… Les mecs qui sont morts avec lui ce jour-là, les Bar-Kays, avaient également un bel avenir devant eux… Carl Cunningham, le batteur, était comme un fils pour moi, on était très proches… Avec Jimmy King, le guitariste, et James Alexander, le bassiste, on jouait ensemble tous les week-ends dans un club en dehors du comté… J’aimais beaucoup ces gamins, c’étaient un peu comme mes gosses…
…Ils ont fait un morceau appelé « Son of Shaft ».
Oh oui ! Mais c’était bien après (en 1971), c’était la deuxième génération du groupe (8)… Ils l’ont fait sans me demander, mais bon, ça m’était égal…
C’était déjà fini entre Stax et vous ?
Non. Je n’allais pas tarder à partir. Malgré tout, on est resté proches avec les musiciens, même après mon départ de Stax. James Alexander, par exemple, jouait de la basse sur la B.O de « Shaft ». David Porter et moi, on continuait à les aider, même après la sortie de leur hit « Soul Finger ». On leur a écrit quelques titres, dont « Copy Cat »…
Quand est-ce que vous avez réalisé que votre voix était « spéciale » ?
Oh (rires)… Avant la puberté, j’avais une voix très haut perchée. Je chantais des trucs de gamins, j’avais une jolie petite voix, mais à l’adolescence, elle s’est mise à dérailler et à craquer sans arrêt… Et quand j’ai retrouvé ma voix, elle était au deuxième sous-sol ! (Rires) Au lycée, j’ai participé à pas mal de petits concours de chant… Un jour, j'ai repris « Don't Look Back » de Nat King Cole et les filles de l’école ont commencé à me demander des autographes, à m’inviter à déjeuner avec elles à la cafétéria… J’ai commencé à comprendre qu’il se passait quelque chose (avec un regard coquin) et… j’aimais bien la tournure que ça prenait !
puis les années ont passées et j’ai commencé à réaliser que c’était véritablement un art, et que j’aimais vraiment chanter. J’avais toujours chanté mais sans jamais prendre ça trop au sérieux. J’ai fini par comprendre que c’était ce à quoi je voulais me consacrer, donc j’ai continué à chanter et à me battre pour faire ma place. J’ai arrêté l’école après le lycée… J’aurais pu poursuivre mes études, mais je ne voulais pas devenir prof de musique ni chef d’orchestre à la Fac : je voulais devenir un performer, donc j’y suis allé à la dure. J’ai multiplié les engagements avec toutes sortes de groupes tout en faisant n’importe quel boulot la journée pour manger.
Il paraît que Jim Stewart trouvait votre voix trop belle pour chanter du Rn’B.
C’est vrai, il voulait des voix plus dures, plus rugueuses. C’était sa conception du Rn’B, de la Soul. Moi je voulais chanter des ballades, mais il ne voulait pas en entendre parler, il ne voulait pas m’enregistrer… C’est Al Bell (9) qui m’a donné ma chance. De manière générale, Jim n’était pas très ouvert à certaines de mes idées, même au niveau de l’écriture. Quand j’écrivais de beaux arrangements de cordes, un peu novateurs, il gueulait « Mais qui a écrit un truc pareil ?!! » On n’arrêtait pas de lui dire qu’il fallait oser plus de choses avec des instruments à cordes, mais c’était hors de question pour lui.
C’était trop smooth ?
Ouais, c’était trop doux et trop compliqué. Jim voulait des changements simples, genre « 1-3-5 »… Quand j’ai enfin eu l’opportunité d’enregistrer ma propre musique librement, j’y ai intégré tous les éléments qu’il rejetait.
Et vous avez enregistré « Presenting Isaac Hayes » en 1967...
Ouais. (Sur le ton de la confidence) D’ailleurs j’étais complètement bourré ce jour-là… (Il se remémore) Rempli de cake et de champagne. A l’époque quand on célébrait un anniversaire, on fêtait ça avec des cakes et du champagne… Je ne me rappelle plus de qui s’était l’anniversaire, avec Duck (Donald Dunn) on avait piqué deux bouteilles de champagne, un énorme morceau de cake, et on s’était planqué dans le studio. On s’était enfermé pour être tranquille et on buvait comme des trous, allongé par terre. On s’était même endormi pendant un moment et quand je me suis réveillé… je me sentais super bien ! J’étais encore bien bourré mais j’avais un bon feeling, j’étais vraiment bien…
On décolle et là on croise Al Jackson : « Hé ! Tu viens jouer avec nous ? » Et lui il fait « Pourquoi pas ? On s’en fout ! ». Vu qu’on était saouls, je croyais qu’il blaguait, je lui dis « Tu déconnes ? », il fait « Non ! » Moi, j’étais High au champagne, je m’en tapais, alors on est allé au studio tous les trois, Al a mis une cassette et il a laissé l’enregistrement défiler. On a joué les morceaux les uns après les autres, chacun étant un peu le prélude du morceau suivant…
Sur le tournage de « Tough Guys », vous avez rencontré Lino Ventura…
On a tourné une partie du film à Chicago, l’autre à Rome. Lino joue le rôle d’un prêtre, moi je suis un flic démis de ses fonctions, et Fred Williamson (10) c’est le méchant, le mec qui a une embrouille avec mon ex-copine… Lino était quelqu’un d’agréable, il avait l’air gentil mais on ne parlait pas trop… En fait il ne parlait pas anglais, donc on n’a pas eu trop d’échanges (rires)... Mais j’étais très heureux de tourner avec lui. Je l’avais déjà vu dans un film appelé « Valachi Papers » (« Le dossier Valachi » en VF, film de Terence Young avec Charles Bronson). Il jouait le rôle d’un gangster dans ce film. Il avait un visage pas commun, avec un regard très dur : ça m’avait vraiment marqué à l’époque. Quand j’ai vu le film j’étais loin de me douter que j’allais tourner un jour avec ce mec... Quand je l’ai reconnu sur le plateau ça m’a fait tout drôle : « Waow ! C’est Valachi Papers ! »
Vous avez également tourné avec John Carpenter sur «New York 1987».
On ne se connaissait pas à la base. John m’a envoyé le scénario et les répliques du personnage qu’il voulait que j’incarne, plus une note qui me demandait si je voulais bien le rencontrer... Je me suis vraiment senti flatté. C’était quand même le réalisateur d’ « Halloween » qui me demandait de bosser avec lui ! Alors il est venu chez moi à Atlanta, on a longtemps discuté et il m’a dit : « Si tu prends ce rôle, il faut que tu trouves une gestuelle caractéristique, un gimmick qui porterait l’attention sur ton personnage ». Vous voyez ? Comme quand Humphrey Bogart se tripote le lob de l’oreille…
Alors j’ai eu l’idée de ce tic qui consiste à contracter la moitié du visage (le même tic que l’acteur japonais Takeshi Kitano), comme si le mec avait eu un nerf tranché dans une bagarre et qu’il ne contrôlait plus une partie de son visage… Mais j’étais pas trop sûr de mon coup alors on a fait un bout d’essai filmé, et en fait ça marchait plutôt bien, du coup c’est resté. C’est facile de bosser avec John parce qu’il est très précis et très déterminé. Chaque scène est réglée à l’avance dans les moindres détails, il visualise parfaitement la chose avant de la filmer : si un figurant traîne des pieds au fond du plan, il va tout de suite le voir et en deux secondes, c’est réglé.
Carpenter est incroyablement sous-côté en tant que cinéaste…
C’est vrai, la plupart des gens passent à côté… Mais quelques unes de ses réalisations ont atteint le statut de films cultes dans leur genre.
Et Mel Brooks ? Vous faites une apparition dans "Sacré Robin des Bois" (12)
Mel est vraiment impressionnant, il peut tourner une scène de mille façons différentes. Travailler avec lui c’était comme aller à l’école… Et puis il est trop poilant. Vous vous rappelez de ce film qui se passe au Moyen-âge ? Mel joue le rôle du roi… A un moment, il se balade dans le jardin et il croise une jolie fille qui ne fait pas trop attention à lui, alors il fait «Hum, hum… Oh Yes It’s good to be the King !» (Il explose de rire)
Côté musique, dans les années 80, vous avez également travaillé avec Donald Byrd (13)…
J'ai produit deux de ses albums : «Love Byrd» et «Words, Sounds, Colors & Shapes». J’ai rencontré Donald après la sortie du hit des Blackbyrds «Rock Creek Park» (sur l’album «City Life», 1975). Bien entendu, j’avais écouté ses albums de jazz, mais Donald Byrd s’était lancé dans un registre plus commercial avec «Rock Creek Park»… Je vivais à Atlanta à l’époque. Quand Donald a débarqué en ville, il a fait la connaissance d’une fille appelée Carol Lee. Cette Carol sortait avec Oscar, un ami à moi - c’est lui qui a écrit le script de «Truck Turner» -. Un jour Oscar me dit «Ca te dirait de bosser avec Donald ? Je peux arranger ça si ça te branche» Alors Oscar m’a présenté Carol, et Donald a ramené toute son équipe à Atlanta. Il a ramené de TRES bons musiciens de jazz, des types fabuleux : Ronnie Garrett, Myra Walker, un clavier appelé Albert “Chip“ Crawford et d’autres types dont j’ai oublié le nom…
De tous les chansons qu’on a faites ensemble, «Fallin» est celle que je préfère. (Il chante) “I just came here / fallin for your eyes / fallin for your stars...” C’est marrant parce cette chanson est comme son titre : les changements ne cessent de tomber, à chaque fois qu’on entend le mot “Fallin“. C’est une belle chanson…
Tout comme vous, Donald Byrd a été beaucoup samplé. Y a-t-il des raps que vous préférez parmi ceux qui vous ont samplé ?
Oh la la… Mais y en a trop ! Ils m’ont tous samplé… (Il réfléchit un bon moment) Il y a un morceau qui a vraiment retenu mon attention, c’est celui des Geto boys : «My Mind Playin Tricks on Me»… Les mecs ont samplé «Tough Guys». C’est la scène du jukebox, quand les mecs arrivent au bowling. Et il y a un autre rap que j’ai trouvé vraiment chouette, c’est… J’ai oublié le nom du groupe, ils ont repris «Ike’s Mood», que Mary J. Blige et quelques autres ont repris également…
C’est pas Smif-N-Wessun et Mary J. Blige ? (« I love you remix » avec la boucle de piano de « The Look of Love »)
Non, je ne crois pas… C’est juste quelques arpèges de piano, les mecs avaient tirés seulement quelques notes d’une très longue intro, c’était pas mal… Mais pleins de groupes l’ont repris après eux. C’est Big Daddy Kane qui m’a mis la puce à l’oreille au sujet du sampling. Un jour, on discutait - c’était sur le tournage de «Posse» - et il me fait « J’arrive mec, je vais te pomper dans tous les sens ». Sur le coup, j’ai vraiment pas compris de quoi il parlait (rires). Mais j’ai réalisé peu de temps après… Attendez, je crois que je me rappelle d’un autre rap : c’est une fille qui rappe, Monie Love («Better Way»). Elle a repris l’intro de «Look Of Love»…
C’est le même sample que Jay-Z sur «Can I live» ?
Non, non… Jay-Z a utilisé un sample tiré de "Shaft" (14). J’ai vu qu’il était fauché alors je l’ai laissé l’utiliser…
En général, vous aimez ce que les rappeurs font de votre musique ?
Non. Ca me déplaît beaucoup quand ils commencent à se la jouer « violents ». Quand c’est comme ça, je préfère ne pas les laisser me sampler. Ca sert à rien quand les mecs sont nuls… C’est pas que je n’aime pas le rap : c’est la merde négative que je n’aime pas. Quelques uns seulement ont fait de belles choses… Enfin… Grâce à James Brown, on a quand même pu toucher de l’argent du sampling.
Pour finir, vous avez composé «Shaft» en 1971… Peu de temps après Curtis Mayfield sort « Superfly », puis Marvin Gaye fait fort avec « Trouble Man »… C’était une période extraordinaire. Est-ce que vous l’avez vécue comme un défi ?
Non, parce que j’étais le premier à le faire et à avoir du succès. Cela dit, «Superfly» est un disque incroyable. Et «Trouble Man» n’est pas mal non plus… (Il marque une pause) Ouais, Superfly is the Bomb, c’est certainement la meilleure de toutes les B.O…
Je ne dis pas ça pour ôter du mérite à leurs auteurs, mais c’est moi qui ai ouvert la porte à ce genre de disques. En faisant «Shaft», j’ai ouvert la voie à toute une génération de compositeurs afro-américains, et je peux vous dire que ça n’a pas été simple d’être le premier à s’aventurer dans ces eaux-là. Le comité des Oscars ne voulait même pas entendre parler de ma nomination. Il a fallu qu’on se bagarre, et que Quincy Jones, Jesse Jackson et Dominic Frontiere (15) se joignent à nous pour qu’on puisse entrer en compétition. J’ai donc été nominé dans deux catégories et pour finir j’ai gagné l’Oscar de la “Meilleure Bande Originale“. Ce fut un grand pas en avant…
1 Booker T. Jones aux Claviers, Donald Dunn à la Basse, Steve Cropper à la Guitare et Al Jackson Jr (assassiné en 1975) à la batterie sont Booker T & The MG’s.
2 Initialement batteur chez Stax, Howard « Bulldog » Grimes est éclipsé par le talent d’Al Jackson des MG’s. Le Bulldog intègre alors la Hi Rythm Section de Willie Mitchell et enregistre avec Ann Peebles et Al Green.
3 Jim Stewart et Estelle Axton étaient les Boss du label Stax (St + Ax).
4 Le Studio de Stax se trouve à Memphis (Tennessee) tandis que la Motor Town de Detroit est au Nord, près de la frontière canadienne.
5 Star locale en tant que Chef d’un orchestre de Rythm & Blues, Willie Mitchell entre dans la légende en devenant vice-président, puis président de Hi Records dans les années 60. Il produit Ann Peebles, O.V Wright, Syl Johnson puis Al Green. Dans les années 90, RZA du Wu Tang Clan sample abondamment sa discographie et initie toute une nouvelle génération à la Soul memphisienne.
6 Al Jackson joue sur de nombreux standards d’Al Green comme « Let’s Stay Together », « Call Me », « You Ought To Be Me »…
7 En décembre 1967, l’avion bimoteur Beechcraft d’Otis Redding tombe à pic dans la zone glacée du lac Monona dans le Wisconsin. Le chanteur, le pilote, un assistant, ainsi que 4 membres des Bar-Kays meurent. Ben Cauley trompettiste du groupe, 20 ans à l’époque, est le seul survivant.
8 Cauley, le survivant du crash, et Alexander, qui n’avait pas pris l’avion, reforme les Bar-Kays, en 1969, avec cinq nouveaux musiciens.
9 Vice-président de Stax en 1968, après avoir été directeur de la promotion. Al Bell est le premier Noir dans l’état-major du label.
10 Icône de la Blaxploitation. Cf son rôle de Tommy Gibbs, le Parrain de Harlem, dans « Black Caesar » et « Hell up in Harlem » (Larry Cohen, 1973). La première sequence de « Black Caesar » avec « Down & Out in New York City » de James Brown est plus fatal qu’une tornade.
11 «Robin Hood, Men in Thights» en version originale. Littéralement : “Robin des Bois, des Hommes en collants“.
12 « La Folle histoire du monde » (1981). Avec sur la B.O : «It’s Good to Be the King Rap » repris sur «Respect» d’Alliance Ethnik & Vinia Mojica.
13 Trompettiste Hard Bop pour les Jazz Messengers ou John Coltrane, Byrd, à partir des années 70, crée un son « funk » au contact des frères Mizell. Professeur à Howard University, il recrute parmi ses meilleurs élèves le line-up des Blackbyrds.
14 «Reservoir Dogs» feat. The L.O.X, Sauce Money sur “Vol. 2... Hard Knock Life”
15 Compositeur de nombreux Scores dont « Pendez-les Haut & Court » avec Clint Eastwood, la série TV « Matt Houston » ou « Le Goût des Autres » d’Agnès Jaoui.
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